Fiabilité d’un bêta-lecteur : mon relecteur a-t-il toujours raison ?

La fiabilité d’un bêta-lecteur dépend de plusieurs facteurs. Pour s’assurer que votre relecteur est capable de vous aider sur un manuscrit, il faut se demander si votre bêta-lecteur est la bonne personne pour ce texte. Il est important ensuite de s’intéresser aux compétences de votre bêta-lecteur. Et enfin, il est fondamental de s’assurer que votre bêta-lecteur a bien compris ce que vous souhaitiez faire avec ce texte.


Quelle est la fiabilité de mon bêta-lecteur ?


C’est une question classique que se pose nécessairement un auteur lorsqu’il essaie de trouver un bêta-lecteur. Cette interrogation émerge à plusieurs moments :

  • avant de choisir son ou ses bêta-lecteurs
  • ou après avoir reçu les premiers retours.

Puis-je prendre en compte les avis de mon relecteur ? Dois-je ignorer toutes ses annotations ? Et même lorsque vous travaillez avec un bêta-lecteur que vous connaissez bien, avec qui vous avez déjà collaboré et en qui vous avez toute confiance, la question revient nécessairement.

Et il ne s’agit pas d’un caprice d’auteur. L’avis d’un bêta-lecteur pèse toujours très lourd dans le processus de révision du manuscrit. S’interroger sur la fiabilité d’un bêta-lecteur est donc une étape importante, et ce bien avant d’élaborer un plan pour retravailler votre roman.

De la même manière, pour tempérer l’aspect subjectif d’une bêta-lecture, il peut être intéressant de demander l’avis de plusieurs bêta-lecteurs.

Je tiens à préciser qu’il n’est aucunement question de juger la personne qui donne de son temps pour vous faire un retour sur votre manuscrit (ce serait très mal venu de la part de l’auteur), mais plutôt d’évaluer la pertinence des retours de votre relecteur. La nuance est importante.

Voici donc quelques éléments à prendre en compte.


Mon bêta-lecteur est-il la bonne personne pour ce texte ?


La question peut surprendre. Pourtant, elle est essentielle. Et il est important de le comprendre avant de choisir un relecteur pour votre manuscrit, qu’il soit professionnel ou amateur.

Un bêta-lecteur est avant tout un lecteur qui a ses propres goûts, ses propres sensibilités. Essayez par exemple de donner un livre de Proust à un enfant de 7 ans. Il va vous dire d’emblée, au bout de 2 lignes, qu’il s’ennuie. L’enfant de 7 ans n’est en effet pas le bon public pour ce livre… Cet exemple est un peu extrême, mais il a le mérite d’être clair.

Il en est de même pour votre bêta-lecteur. Imaginez que vous avez écrit une histoire d’amour subtile où vous avez travaillé très dur sur les relations entre vos deux protagonistes. Allez-vous demander à un relecteur qui déteste les romances de se pencher dessus ? Quels types de retours allez-vous obtenir ? Comment pourrez-vous trier ses retours ? Surtout si vous recevez des commentaires du genre :

« C’est niais ! »

Ou encore :

« Je m’ennuie ! Quand est-ce que l’on passe à des scènes plus épicées ? »

Laissons de côté offensant de ces retours… Comment l’auteur du manuscrit peut-il se fier à ces commentaires pour reprendre son texte ? Le relecteur en question pointe-t-il un problème de rythme, de tension narrative et de caractérisation des personnages ? Ou bien n’est-il tout simplement pas intéressé par ce type d’histoire ? Dans le premier cas, il est très important de prendre en compte son avis. Dans le deuxième cas, mieux vaut ne pas l’écouter tout de suite… et obtenir un autre avis.

Outre son âge, la fiabilité d’un bêta-lecteur dépend donc de ses goûts littéraires. Et il est important de poser des questions à votre bêta-lecteur à ce propos avant de lui confier votre texte. Cela fait partie du processus.

Si vous vous intéressez à mes goûts de lecture, vous pouvez consulter la page « À propos » de ce site.


Fiabilité d’un bêta-lecteur : ressenti et diagnostic


À titre personnel, je pars du principe que tout avis est bon à prendre. Je retire toujours quelque chose des retours d’un bêta-lecteur. Cependant, ce peut-être très inégal. Avant de demander à un relecteur de lire votre manuscrit, assurez-vous qu’il sache ce qu’est une bêta-lecture et comment réaliser une bêta-lecture efficace. Si ce n’est pas le cas, prenez le temps de lui expliquer ce que vous attendez d’un votre bêta-lecteur. Car, la fiabilité d’un bêta-lecteur dépend aussi de ses compétences.

Imaginons que votre bêta-lecteur est déjà aguerri, qu’il sait ce qu’il faut faire pour vous venir en aide et qu’il est la bonne personne pour ce texte. Devez-vous pour autant considérer ses avis comme parole d’évangile ? Malheureusement, non.

Fiabilité de la position du lecteur

La position du lecteur, c’est-à-dire celle du ressenti, est toujours juste, justifiée et non critiquable. Et en tant qu’auteur, il serait mal venu de la remettre en question. Quand votre bêta-lecteur vous dit qu’il a eu des difficultés à rentrer dans votre texte, vous ne pouvez pas lui dire :

« C’est faux ! Tu n’as rien compris au génie suprême de mon œuvre ! C’est juste que tu es dur de la comprenette ! ».

Comme d’habitude, je grossis volontairement le trait par souci de clarté (et parce que cela m’amuse). Mais, même si les échanges étaient plus subtils que cela (heureusement), ce sont des discussions auxquelles j’ai déjà assistées entre un auteur et son bêta-lecteur. 🙂

La morale de cette petite histoire, c’est que vous ne pouvez tout simplement pas remettre en cause le ressenti de votre relecteur, même s’il est dur à encaisser… Il s’agit de son ressenti. S’il s’ennuie, il s’ennuie. Point final.

Cependant, il est important de ne pas en rester là. Le « je » est un sentiment personnel, ce n’est pas une vérité universelle. Même s’il n’est pas critiquable, le ressenti de votre bêta-lecteur n’est pas non plus fiable à 100 %. En effet, par définition, le ressenti est profondément affecté par les goûts personnels, l’âge et l’univers mental ou social de votre bêta-lecteur. Demandez-vous si votre bêta-lecteur représente bien votre lectorat cible.

De la même manière, votre bêta-lecteur va peut-être vous dire qu’il a ADORÉ (avec plein de points d’exclamation, s’il vous plaît) votre manuscrit (et rien que cela, c’est déjà énorme ! Chapeau bas !). Cependant, emporté par votre plume, votre relecteur va peut-être passer à côté d’éléments dramatiques ou narratifs que d’autres lecteurs, moins sensibles à votre prose ou à l’histoire, ne manqueront pas de vous faire remarquer. Même si un lecteur a aimé, cela ne signifie pas qu’il n’y a rien à changer.

Fiabilité d’un bêta-lecteur : la position du diagnostic

Hum. Le diagnostic de votre bêta-lecteur est un outil extrêmement précieux pour avancer sur un texte. Car, il vous permet de mettre en lumière les mécaniques narratives que vous avez négligées dans votre manuscrit ou que vous maîtrisez moins bien. C’est aussi un outil sans commune mesure pour progresser dans votre pratique de l’écriture. À titre personnel, j’aime beaucoup les bêta-lecteurs capables de me faire une bonne grosse analyse bien dodue. C’est grâce à eux que j’ai autant avancé dans ma pratique de l’écriture. Que j’ai eu toutes ces illuminations.

Mais, le diagnostic est un outil à prendre avec beaucoup (beaucoup) de précautions. Le bêta-lecteur a ses propres goûts (de lecture), et il va donc vous orienter vers ce qu’il aime. Si votre bêta-lecteur est un adepte des page turner, il y a de fortes chances pour qu’il vous donne une analyse qui vise à muscler la tension narrative. Cependant, est-ce réellement ce que vous souhaitez, vous, en tant qu’auteur, pour votre texte ?

Plus important encore, votre bêta-lecteur pense avoir compris les origines des dysfonctionnements potentiels de votre texte. Mais, a-t-il seulement raison ? Car, il est important de préciser que la dramaturgie et la narratologie ne sont pas des sciences. Ce qui est vrai pour un texte ne l’est peut-être pas nécessairement pour un autre. Et il existe probablement de nombreuses mécaniques narratives encore non découvertes.

L’auteur doit donc analyser tout cela à tête reposée avant de prendre une décision.


Fiabilité d’un bêta-lecteur : mon relecteur a-t-il compris ce que j’ai voulu faire ?


Même un relecteur avec qui vous avez l’habitude de travailler peut complètement passer à côté de votre roman. C’est quelque chose dont vous vous rendrez compte assez vite en lisant les commentaires.

Imaginons que vous ayez écrit un roman où vous avez beaucoup travaillé le débat moral (au sens de John Truby). Par exemple, le message que vous souhaitez faire passer, c’est « aimez-vous les uns les autres ! ». Et toute votre histoire sert à montrer pourquoi c’est important selon vous. Cependant, votre relecteur vous demande plus de violence et de sang. Là, vous aurez raison de vous interroger.

Si les commentaires de votre relecteur vous semblent hors de propos ou non pertinents, il y a des chances pour qu’il n’ait pas compris vos intentions pour ce texte. Et c’est là une information importante en soi : cela signifie que vous avez raté votre coup, que votre roman manque de clarté. Ceci dit, si votre relecteur n’a rien compris à votre histoire, la plupart de ses raisonnements, analyses ou annotations risquent de tomber à côté de la plaque.

De la même manière, cette mécanique peut se décliner sur chaque chapitre du roman : votre bêta-lecteur a-t-il compris ce que vous avez souhaité faire dans ledit chapitre ? Car, on peut avoir une bonne compréhension globale du roman et passer complètement à côté d’un chapitre.


Conclusion


La fiabilité d’un bêta-lecteur est essentielle pour un auteur. En effet, comment pouvez-vous revoir votre manuscrit si vous ignorez si les retours que vous avez obtenus sont pertinents ? Aussi, avant de choisir votre bêta-lecteur, il est important d’en savoir un peu plus sur lui : ce qu’il aime lire, s’il sait ce qu’est une bêta-lecture et comment faire une bonne bêta-lecture. Car tout relecteur n’est pas nécessairement un bon bêta-lecteur.


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